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Le jour J, départ programmé en début d’après midi de la banlieue parisienne, on récupère tout le monde et en route pour une heure vingt de trajet dans la Clio perdue dans le brouillard. On arrive assez tôt sur le lieu du festival qui d’ailleurs était assez mal fléché (mais bon, on avait un GPS). Le lieu, Elispace, est en fait un grand gymnase/salle de spectacle d’environ 1500 places. Les sonos sont déjà bien en place ; montées au petit matin, elles attendent sagement le début des hostilités prévu pour minuit. Au niveau de l’organisation, on retrouve Channel One Sound au fond à droite, Iration Steppas à gauche et OBF contre les gradins à peu près au milieu de la salle. Les enceintes sont positionnées de chaque coté pour les 2 crews anglais mais pas pour OBF arrivés un peu plus tard :

Rico rencontré à ~17h : « Ouais on a pas pu mettre les 2 stacks de chaque coté de la salle parce que niveau câble il devait nous manquer 4 ou 5 mètres, et puis les autres étaient arrivés plus tôt : ils ne nous ont pas trop laissé le choix. En plus de ça on a fini de les monter tôt ce matin, dur dur avec la route de nuit, je viens de me lever… mais t’inquiète pas, ça va péter... »


Qui a dit que je me faisais du souci... ? Le début du festival est déjà entamé quand on arrive dehors (seul endroit où il y a de l’activité en ce début d’après-midi), quelques groupes de rock pas forcément très accrocheurs, une maxi rampe sur un coté, un sound system de l’autre… Même si j’aime bien le rock, je me dirige naturellement vers le sound, ce sont donc Revelation HiFi (venus de Paris eux aussi avec leur sono) avec à leurs côtés Livication Corner (Jérôme Obeah et Thomas Livication). Ils sont là pour combler les entractes et pour jouer quelques tunes histoire de faire patienter les massives avant le choc de la soirée. Manque de pot pour le technicien qui gérait le son de la scène extérieure, les Lillois ne l’entendaient pas de cette oreille et s’amusaient à prolonger les tunes de façon provocatrice… il faut dire qu’ils ont des arguments puisque leur sound pousse bien et les p’tites enceintes de la façade de la scène faisaient pâle figure face à la puissance des basses de Revelation. C’était une vraie guéguerre entre les organisateurs et les deux sounds. On peut comprendre les Lillois qui se sentaient frustrés par des sets qui duraient dans les 10-15 min

Robot Yut (vraiment énervé) croisé aux WC après que l’orga ait mis fin à cette guéguerre : «Franchement, fallait pas nous faire venir pour ça… On a le temps de rien faire…»


Mais non, je ne suis pas d’accord, j’ai même envie de dire que ça nous a bien fait marrer et que ça nous a occupé l’après-midi parce que l’attente était un peu longue, les groupes pas forcément à notre goût. De l’autre coté pour nous amuser il y avait la maxi rampe avec des démos de roller et de BMX, certains riders envoyaient bien du gros sur une vert' bien raide avec un bon mètre et de demi de verticale… On a peu voir quelques MC twist en Roller et des tailwhip en BMX. Juste à coté il y a avait un atelier tag/graff avec de bon artistes (cf les photos). Pour les gens qui n’étaient pas venus voir que du dub, il y a eu les Fatals Picard, groupe bien marrant à voir en live... et la Maison Tellier qui a joué devant une salle presque vide…

La soirée commence véritablement sous le signe du dub vers 20h avec un soleil déclinant et la venue de Weeding Dub, qui avec la présence de Humble I et aussi Mc Oliva (Kanka, BlackBoard Jungle), nous fournit un super set. Un set énergique ou Romain aux machines excelle, permettant à Humble I de poser sa voix sans soucis. Une «collection» de morceaux de Steppactism plus quelques exclus me semble-t-il (du prochain album Steppactivism II). La petite surprise est venue de Mc Oliva qui d’habitude n’officie pas aux coté de Weeding dub : une collaboration franchement intéressante avec par exemple un remix d’un morceau de Kanka par Romain avec la voix de Mc Oliva… Le concert s'est surtout enflammé grâce à la superbe voix et l’énergie d’Humble I qui sautait comme un cabri sur scène, le tout agrémenté d'un superbe coucher de soleil. Splendide.

On retourne dedans car la fraicheur commence à se faire sentir et surtout parce que c'est l'heure de Max Romeo. Entouré de tous ses musiciens, il fait une arrivée triomphale sur la scène en reggae hero. La totalité du set fut d'une qualité, d'une fraicheur et d'une énergie remarquables pour l'âge du bonhomme.

Le moment tant attendu par les nombreux bass addicts venus des quatre coins de l'hexagone (cherchez l'erreur) arrive enfin, les trois sound systems sont prêts à apporter les bonnes vibes dubwise pendant près de 6h.

Plutôt que de détailler la sélection qui sera par ailleurs de très haut niveau, abordons plutôt les différents points qui ont caractérisé les sounds durant cette danse, vidéos et extraits audio à l'appui.

Iration Steppas était le sound le plus attendu de cette soirée, non seulement car c'était la première fois qu'il venait en France, le system au complet mais aussi de par sa renommée internationale dans le milieu du dub et des sound systems.
Inutile de décrire qui constitue le sound car même si presque tout le crew est présent (il manque Jazzbo), c'est bien Mark Iration qui assure le spectacle : Il a le contrôle sur tout le system, de la sélection au mix en passant par les effets (sirènes, synare) et des improvisations au chant très réussies.
Et le label dubz in a 3000 year style figurant sur le drapeau les surplombant ne faillira pas à sa réputation pendant cette soirée. La sélection de Mark est un peu différente qu'à l'habitude (où il fait la promotion d'artistes et dub makers du monde entier) car il ne jouera quasiment que des dubplates, spéciales et remixes provenant de son propre studio, le High Rise.
Les massives qui apprécient les productions Iration Steppas ne seront pas déçus, chaque tune est sombre, aux rythmes lents et la basse d'une lourdeur absolue nous fait vibrer à travers le puissant system.
Iration Steppas sera finalement le sound le plus technique : derrière chaque mix ou série d'effets, Mark cherche à nous faire ressentir un maximum de sensations et de vibrations dans une joyeuse symphonie du chaos sonnant comme une longue marche des righteous-men contre babylon. Un extrait :


Iration Steppas - Kilimanjaro remix

Les membres de Channel One sont aussi venus avec le system complet et ne faiblissent pas sous les tunes envoyés par Mark Iration et Rico, au contraire : quand vient leur tour, ils redonnent du rythme à l'ensemble en envoyant des pépites roots reggae ou digital idéales pour skanker (je ne me suis pas privé ;) ).
Mikey Dread assure une sélection pointue strictly vinyl (il en ramène peu et il faut le voir choisir LE tune) et dans la tradition des sound systems, il joue la version chantée puis enchaîne par le dub qui peut parfois se décliner en 3 ou 4 mixes différents ; il envoie aussi quelques instrumentaux géniaux.

Montage des prestations de Channel one :


Mikey a un atout de taille derrière lui et il s'appelle Ras Kayleb, immense rastaman et fidèle singjay de Channel One qui tel un Lion rugit des lyrics rastas inspirés sur les versions et assure l'animation pendant les changements de tunes.

Il n'y a pas que le dub dans une danse, il y a aussi le reggae !

clame Mikey Dread en regardant fièrement Mark Iration à l'autre bout de la salle. C'est ainsi la vision d'une session sound system façon Channel One qui, plutôt que de faire une croix sur ce qui a fondé le dub d'aujourd'hui, est là pour le célébrer.

Vision que partage aussi OBF qui auront la sélection la plus éclectique de la session, pouvant aisément passer du remix d'un killer tune de Johnny Clarke ou Rod Taylor à des productions digital steppa à scotcher sur place.
OBF, c'est à la fois la fougue d'un jeune sound comparé aux deux autres présents et l'assise d'un sound expérimenté (ils organisent quand même les soirées Dubquake de Genève depuis 2 ans). Ils sont donc là pour défendre la France (j'ai l'impression de parler de foot) et ils le feront très bien. La sélection est vraiment de haut niveau, les dubplates fusent et les mixes dub sont intenses et rythmés, rien n'échappe à Rico et Guyhom qui surprennent même les plus réfractaires au steppa digital.
Ils ont avec eux deux guest singers - Humble I et Pupajim (chanteur et riddim maker du crew breton Stand High) dont les prestations seront remarquables sur toute la durée de la session. La preuve :


OBF ina dub fi dub

Vous l'aurez compris, il n'y avait aucun outsider pendant cette session, chaque sound avait sa place dans la danse, ses moments de gloire surtout à l'heure du dub fi dub où ils nous ont tous sorti des tunes démentielles. Et il y en avait pour les goûts de tous les massives même si ça a assez vite embrayé sur du steppa.
Cette session rejoint le Panthéon de celles qui ont marqué et marqueront l'histoire du dub et des sound systems en France (je pense aussi à la session sound system du Ja'Sound 2005 même si je n'y étais pas) comme la première rencontre entre trois immenses sounds UK et français et on espère qu'elle ouvrira la voie à d'autres soirées de ce genre.
L'ambiance était excellente et l'enthousiasme pouvait se lire sur chaque visage, le seul petit bémol vient du manque de massive durant l'ensemble de la session. Des passionnés, il y en avait pour sûr et il sont restés jusqu'à 6h30 du mat', mais des découvreurs peut être un peu moins. Pourtant, au vu de l'éclectisme de la programmation du Mix' Up, on se demande encore pourquoi ils ne sont pas venus plus nombreux.

niz puis Mill3k

Les photos de la soirée :



Enregistrements audio de la session (environ 1h20) : cliquez ici

Les bonus vidéo :



Les photos sur flickr : http://www.flickr.com/photos/nizetch/tags/mixupfestival2008/